J'aurais donc une date de péremption?!

Ou comment après 40 ans, tu bouffes (encore) la vie.


Publié le jeudi, 21 mars 2019 dans la catégorie Welcome to me

Ca y est. J’y suis. Je réalise un vieux rêve : lancer un blog. Oui, ce n’est pas d’une originalité folle, j’avoue. Voire presque dépassé, le blog. Je ne suis pas ce qu’on qualifie une précurseuse en la matière. Je ne m’appelle pas PATAUT pour rien, hein. J’ai souvent fait les choses tard. A part un enfant.
Et là, toute excitée par cette nouveauté du blog, comme un petit chiot qui n'est que joie au retour de son maître après 8 heures passées tout seul, une sale pensée est venue jouer les trouble-fêtes : « Dis-donc, t’es pas un peu tapée pour te lancer dans un truc où la jeunesse numérique fait loi ? D’ailleurs, t’es pas un peu vintage pour te lancer dans un nouveau truc tout court ? » Bah nan...
mon enfant qui quitte le nid, une nouvelle vie commence où je retrouve le 1er rôle, vous croyez vraiment que je vais me gêner?!!

Mais là, une question fait néanmoins "pop" dans ma tête : est-ce que j’ai le droit de continuer à réaliser mes rêves? Je me rends compte en effet du gap entre mes envies et les envies que la société m’autorise, à mon âge. Ah…cette fameuse société et sa cargaison d’injonctions comme par exemple : entre 20 et 40 ans, une femme doit faire sa carrière et des mioches.  Je l’ai fait, le cumul des mandats. Enfin, j’ai essayé de tout bien faire, bonne élève que je suis : maman-célibataire avec une carrière artistique. Cette pression, moi, m’a transformée en un hamster en mouvement perpétuel dans sa roue. Un robot avec des to do lists aussi longues que les séances du Sénat.

Mais si je dézoome un peu, je me dis qu’il y a un truc qui cloche.


Déjà, ça voudrait dire qu’à 20 ans, tu SAIS : ce que tu veux et comment l’obtenir. Ensuite, ça voudrait dire aussi, et là je parle plutôt aux femmes, que tu fais des études mais pas trop longues pour que tu aies un peu d’expérience avant ton 1er bambin. Cela induit aussi que tu rencontres pas trop tard LE-LA partenaire pour vivre cette aventure au merveilleux pays de la famille. Et même quand tout se passe comme sur des roulettes, enfin, comme c’est bien placardé partout dans les magazines, tu te rends compte d’une autre chose incroyable : quand tu deviens maman, tu dois TOUT à ton enfant, ton temps, ton énergie, tout. 
Ton enfant AVANT TOUT. Et toujours avec plaisir et amour, évidemment.
Oui, sauf que tu dois TOUT à ton boulot aussi. Et là, ça commence à se compliquer sérieux quand tu découvres un autre truc dingue : deux mondes parallèles qui font semblant de ne pas voir l’existence de l’autre, celui de la famille et du travail. Aveugles, ils sont. Et autocentrés. Deux grands ados. Une maman qui bosse est bien souvent coincée entre ces 2 mondes comme dans un épisode de Black Mirror avec sans cesse moultes choix à faire en live (oui, j’ai adoré bandersnatch!) et le sentiment de culpabilité qui les accompagne. Tu réalises gentiment que la litanie suivante : « Aujourd’hui une femme est libre de faire carrière ET d’avoir une famille » , genre ce serait facile, c’est une des plus grosses fake news de la planète. On t’a menti, meuf !

La plus grosse fake news de la planète.


Mais la société a plus d’un tour dans son sac pour motiver la jeune femme dynamique que tu es : elle te mythifie en tant que maman, elle te répète que c’est le plus beau rôle de ta vie, que sans ça, tu ne serais peut-être même pas vraiment une femme, ben voyons, et que de toute façon, comme des milliards d’autres de tes sœurs, tu vas te débrouiller, hein ! D'ailleurs, les medias te bassinent avec des témoignages de femmes qui réussissent TOUT, histoire de bien te faire culpabiliser, certaines femmes écrivent même des bouquins comme Choisissez TOUT de Nathalie Loiseau, très intéressant mais à accueillir avec précaution : toutes les femmes ne sont pas blanches et issues d'un milieu aisé. Donc suivant ton histoire, ton milieu social, ta couleur, ta religion, ton orientation sexuelle et j'en passe, les choses ne se réduisent pas seulement à une question de volonté et de niac. La charmante société (patriarcale, ne l'oublions pas) te qualifie même de warrior , de Super Héroïne pour gonfler ton ego et te donner du courage.

Et toi, tu plonges. J'avoue, mon ego s'est parfois senti surpuissant au début de cette folle vie de contrôle intensif. Bon et puis, t’as pas trop le temps de te poser des questions, y a urgence : s'occuper du minot, de la maison et du boulot pour lui payer des petits pots, au minot (ah non, c'est vrai, faut les faire soi-même avec des légumes bio, ooops...).
Tu cours, tu cours, jusqu’à l’épuisement. Dans ta jolie roue qui commence sérieusement à grincer.

Et tu te retrouves en 2019, face à ton ordi, remplie par l’enthousiasme de ta nouvelle liberté et tu prends en pleine face que…passer la quarantaine, tu commences à faire partie de cette catégorie de gens qui rentrent moins dans les études statistiques de ceux-celles qui font avancer le monde. Soit-disant moins cools because moins jeunes. Quand tu passes 40 ans, oust, du balai : la société t’exclut, te met discrètement à la poubelle. Et pas la jaune.

Direct dans la poubelle verte?!!

Donc, je résume, j’aurais passer genre plus de 15 ans à jongler avec 2 vies qui ne doivent jamais se rencontrer pour ensuite être mise en quarantaine ?! Et devoir justifier d’avoir toujours certaines envies à mon âge, considéré par certain-e-s comme avancé? Euh…bah, non, ça va pas être possible en fait. La société, tu déconnes ou quoi ?! Parce que moi, les rêves que j’ai mis sous mon tapis à poils bouclés bien aspiré pendant toutes ces années, autant de dire qu’il va falloir méchamment que je m’en occupe ces prochaines années. Et que là, je suis dans les starting blocks.
Et puis, laisse-moi te balancer une breaking news des familles : je suis la preuve vivante qu’il n’y a pas un truc qui, biologiquement, s’arrête en terme de rêves. Pour tou-te-s ceux-celles qui ne sont pas encore considéré-es comme de « vieilles personnes », je vous le dis : tu n’entends pas un petit clic qui s’arrête le jour de ton quarantième anniversaire, comme un compteur EDF quand tu résilies ton contrat. Que nenni. J’ai bien fait gaffe quand j’ai passé cette étape fatidique : j’ai rien entendu, que dalle. J’avais toujours la furieuse envie de faire plein de trucs. Je m’habillais pareil (mon style vestimentaire a fait péter la rétine de plus d’un être humain sur cette planète), je rigolais toujours autant pour des trucs débiles et j'avais toujours mille idées à concrétiser. 
Et la chose la plus WTF de tout ça est que je ne me sens pas vieille. Ben non. Ce sont plutôt les autres qui parfois me renvoient ce sentiment. Et pas en me voyant, non, parce que j'aurais une chance incroyable : je ne fais pas mon âge. C'est méchamment triste quand on y pense à deux fois. Donc, ce n'est pas en me voyant qu'on me renvoie à mon âge mais plutôt quand on apprend mon âge. Généralement, c'est accompagné d'un involontaire mais bien tranchant : "Ah quand même...".

Et là, je ne peux m'empêcher de faire un petit parallèle avec la sortie de Yann Moix dans Marie-Claire (Marie-Claire avec son lectorat de cinquantenaires en puissance, j’en ris encore.). Après la réaction émotive générale et bien rassurante, je me suis dit que si ses propos étaient bien tristes, ils reflètent l’opinion de beaucoup d’hommes et…de femmes et  nous montrent une fois de plus la puissance de notre conditionnement genré. Nous avons un gros passif en matière de rapports homme-femme et nous ne sommes pas tous logés à la même enseigne selon notre genre et notre histoire personnelle. La femme était, et est encore dans pas mal de situations, un accessoire de valorisation pour un mâle alpha,  un objet de convoitise auprès de ses congénères masculins, une preuve de sa puissance et de sa réussite. 
Quant aux femmes, il valait mieux être belle pour trouver un mari qui était synonyme de sécurité financière vu que niveau boulot, on n'avait pas beaucoup de pouvoir ni de possibilités (c'est seulement depuis 1965 qu'une française peut accepter un boulot de façon autonome). Et nous avons gardé des stigmates de tout ça. Le manque de confiance des femmes est encore très fort et je comprends que nombreuses d'entre nous misent encore beaucoup sur la beauté physique imposée par notre société et donc...la jeunesse.

Le combo gagnant : mince, jeune et blanche.


Les médias, les entreprises entretiennent encore ce culte de la jeunesse et de la beauté normée à savoir mince et plutôt blanche. 
Je pense qu’aujourd’hui encore, moultes femmes ont intégré qu’à un certain âge, elles ne valent plus rien, ne sont plus séduisantes, désirables. Et le regard des autres confortent cette fausse croyance. On voit d'abord l'apparence physique, ce qu'elle représente, son statut plutôt que la personne dans son entier. Il y a quelques temps, les propos de Yann Moix n’aurait pas fait tant de bruit parce qu’on ne remettait pas autant en cause la violence sexiste. Mais il y a eu le #metoo qui a engendré une prise de conscience générale. Etre choqué est un bon signe. Mais les comportements mettront du temps à changer.  Le body positive, c’est tout neuf. Les filles n’ont pas encore toutes arrêté de faire souffrir leur corps pour atteindre une esthétique normée. Et je vais continuer à me prendre mon âge dans la tronche encore quelques temps. Mais si on jette un œil à l’espérance de vie actuelle (79,5 ans chez les hommes et 85,4 ans chez les femmes), on se rend bien compte qu’il va falloir que je m’occupe encore pendant un petit moment !
Je ne dis pas qu’il n’est pas trop tard pour certaines choses : devenir danseuse étoile, oui, ça, c’est archi mort pour moi. (Rien à foutre, je fais de la danse Gaga
Mais beaucoup de mes rêves n’ont pas dépassé leur date de péremption. Alors je vous le dis : que vous ayez 15, 20, 30, 40, 60, 80 ans, l’important est de trouver sa place ici-bas. Et souvent, ça passe par se détacher des attentes qu’on a de vous, qu’elles soient sociétales, familiales ou culturelles. Non, c’est pas fastoche. Et ce n’est sûrement pas moi qui vais jouer les donneuses de leçon vu comment j’ai répondu à moultes injonctions au cours de ma vie. Il semble même presque plus simple de suivre une injonction que de s’en détacher. Parfois, il faut une vie entière pour ça. Mais c’est possible.Comme de lancer son blog, d’apprendre la guitare, de s’habiller chaque jour avec au moins 3 couleurs de l’arc en ciel, tout ça après 40 balais.

Soyez UNIQUENTONGENRISTE !

Du coup, je me mets à rêver encore plus, maintenant que j’ai plus de temps pour ma pomme, et je rêve d’un monde où on ne met pas les gens dans les cases, où on ne définit pas les gens par leur sexe, leur âge, leur statut social, leur couleur mais par leurs actes, leurs comportements, leur idées. J’appelle ça : l’Uniquentongenrisme. C'est un mouvement, sorti de ma petite tête, où tu as le droit, voire même le devoir, d’être toi. (Si tu veux que je développe, balance-moi ton mail et je te tiens au jus sur les prochaines dates de mon seul en scène) J’espère bien que je ne m’arrêterai jamais d’entreprendre. Que ma fille aussi. Qu’elle aura la possibilité de rêver encore plus car moins tiraillée entre les « 2 mondes »(rire démoniaque)Et c’est aussi ce que je vous souhaite. La vie n'est pas un long fleuve tranquille, il y aura toujours des matins avec la gueule dans le cul. Mais ne laissez personne éteindre le feu de vos envies. Et là, c’est surtout aux jeunes femmes que je m’adresse (désolée, les gars, on n’est pas encore vraiment égaux face au cocktail travail-famille) : soyez gentilles avec vous. Je sais que, pour beaucoup, vous avez une pression de malade sur ce que vous devez faire, aimer ou être. Y a pas de choix miracle dans notre monde pour l’instant. Mener carrière et famille de front a un prix et n'est pas toujours possible, même avec la meilleure volonté du monde. Et on vous collera sûrement des étiquettes sur le dos peu importe ce que vous déciderez. Pour fréquenter beaucoup de femmes entre 20 et 40 ans, je sais combien les choix de vie pèsent sur vous, une autre forme de charge mentale. Régulièrement, je découvre une nouvelle copine confrontée aux mêmes questionnements teintés d'angoisse : "La maternité ou pas? Quand? Maintenant ou je congèle mes ovocytes pour plus tard? Et plus tard, ça marchera? Mais maintenant, c'est le moment de faire avancer ma carrière, non? Est-ce que j'ai vraiment envie d'un enfant? Et ne pas en avoir envie, c'est mal? Est-ce que je peux en avoir d'ailleurs? Et si je n'arrive pas à en avoir?" Je sais à quel point c'est cornélien. Vous avez le droit de vouloir des bambins ou pas (comme le mouvement birthstrike , une motivation parmi d'autres), même d'en avoir eu de ne pas aimer le rôle de maman (ça n'empêche pas d'aimer son enfant, hein), ou alors d'en vouloir plein. Ou de bosser tout le temps. Tout ça vous appartient. Y aura toujours quelqu'un pour vous juger. Comme y aura toujours des gens pour me dire que je suis pathétique avec mes couleurs, mes paillettes et mes arc en ciel. Qui me diront même que je suis super has been, que je fais du jeunisme ou que je commence à être tapée. Je m'en bats les reins. C'est pas une date sur mon passeport qui changera ce que j'aime, ce que je pense et ce que j'ai envie d'entreprendre.

Je compte bien profiter de cette nouvelle vie qui s’offre à moi et que j’aime déjà follement. A commencer par ce blog, mieux qu’un anti-ride à presque 1000 boules les 50ml (oui, ça existe ).

En tout cas, aujourd'hui, 2ème jour de printemps 2019, j'ai fait un grand saut, j'ai lancé mon fucking blog, dans lequel je vais parler de tout ce qui me passe par la tête et le partager avec vous. Je ne sais pas si c’est une bonne idée. Vous me direz.

Welcome to me marque une étape dans ma vie. C’est comme un mantra. Et c’est bien fébrilement que je vous remercie de m'avoir lue. Il ne me reste plus qu'à vous souhaiter un énooorme : WELCOME TO YOU !

 




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Comments (3)

  • Aurelie

    Aurelie

    • 27 mars 2019 at 17:50
    • #

    Bon, en somme, tout ce que l’on nous demande depuis toujours est juste chimérique ??
    Si j’ai bien compris, on a le droit de se tromper, de prendre son temps et de recommencer quand on veut ?
    Claire, Merci pour ce bel article, Personne n’est PARFAITE et c’est tant mieux!

    reply

  • Pauline

    Pauline

    • 15 avril 2019 at 21:34
    • #

    Tes conseils de "d'jeun's daronne" donnent du baume au cœur Simone !
    Hate de te lire prochainement

    Signé Groom

    reply

    • Claire

      Claire

      • 11 juin 2019 at 10:15
      • #

      Merci Pauline pour ton message et Welcome to YOU sur welcome to me ! Oui, Simone n'est jamais loin de moi ;) Le prochain article est sur le consentement, tu me diras, des bisettes de darling.

      reply

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